KOSOVO : HISTOIRE D’UNE
COHABITATION IMPOSSIBLE
En 1974, le Kosovo, dont 90% de la population est d’origine
albanaise, obtient le statut de région autonome à
l’intérieur de la République serbe. Dès
le début des années 80, les Albanais sont victimes
d’une répression judiciaire féroce pour
avoir réclamé le statut de République.
Belgrade profite du climat de précarité économique
et d’insécurité grandissant pour attiser
le nationalisme serbe et pousser cette minorité à
réclamer l’unification du Kosovo à la
Serbie.
A
son arrivée sur le devant de la scène politique,
en 1989, Slobodan Milosevic fait supprimer le statut autonome
du Kosovo et incite les Serbes à lutter contre «
les ennemis d’une Grande Yougoslavie », notamment
les Albanais. La résistance albanaise s’organise
avec la création de la Ligue Démocratique du
Kosovo en décembre 1989. A sa tête, le pacifiste
Ibrahim Rugova met en place une contre-société
avec un gouvernement, un parlement, un système de santé
et d’éducation autonomes. Très vite dissout
par Belgrade, le parlement kosovar se réunit dans la
clandestinité et proclame l’indépendance
du Kosovo le 7 septembre 1990 ; Rugova est élu président
en 1992. Mais ce nouvel Etat n’est reconnu que par l’Albanie.
La communauté albanaise se radicalise avec la création
de l’UCK, l’armée de libération
du Kosovo, en 1993. Elle entame une série d’attentats
contre la police serbe à partir de 1996, entraînant
une importante vague de répression contre les Albanais.
En 1998, trois villages albanais sont rasés par la
police, l’armée et des groupes paramilitaires
serbes. De plus en plus de jeunes et de paysans rejoignent
l’UCK. L’armée et les milices serbes poursuivent
leurs opérations de « nettoyage ethnique »
: incendies de maisons, assassinats, exode massif de villageois
; et les affrontements avec l’UCK s’intensifient.
Plus de 1700 Albanais sont tués, 900 portés
disparus et 500 000 déplacés à l’intérieur
du pays.
A partir du mois d’août 1998 l’OTAN lance
une série d’ultimatums à Milosevic pour
obtenir un cessez-le-feu. Du 6 au 23 février 1999,
le « groupe de contact » (Russie, Etats-Unis,
France, Grande-Bretagne, Allemagne, Italie) organise la conférence
de Rambouillet entre les autorités serbes de Belgrade
et l’UCK pour tenter de négocier un accord paix.
Ce sommet est un échec puisque les Serbes refusent
ces accords visant à redonner plus d’autonomie
au Kosovo, et continuent leurs exactions sur place.
Le 24 mars, l’OTAN commence ses frappes aériennes
sur des objectifs serbes au Kosovo et en Serbie. Les Serbes
réagissent en expulsant plus de 900 000 Albanais. Le
9 juin 1999, l’OTAN intensifie ses bombardements pour
obtenir le retrait des troupes serbes et éviter une
intervention terrestre risquée. Ces dernières
se retirent et la KFOR, force multinationale de paix, est
déployée au Kosovo sur décision du conseil
de sécurité de l’ONU et sous l’autorité
de l’OTAN.
Les enquêteurs du Tribunal Pénal International
ont découvert une centaine de charniers et estiment
le nombre de victimes à « au moins dix mille
», preuve d’une stratégie d’épuration
ethnique orchestrée par Belgrade.
Si le déploiement de la KFOR a permis à 800
000 réfugiés albanais de rentrer au Kosovo,
les quelque 250 000 Serbes et Tziganes, qui ont fui la «
contre épuration ethnique » albanaise à
partir de fin août 1999, ont peu d’espoir d’y
retourner un jour. Le retour au calme est fragile, quant à
un Kosovo multiethnique, il semble définitivement enterré.
Anne Boura
REPERES : KOSOVO
Province de Serbie
Capitale : Pristina
Superficie : 10 887 Km²
Population : environ 2 millions d’habitants (Albanais
: 87%, Serbes : 8%, Monténégrins, Turcs, Roms,…
: 5%)
|