A l’assaut du rêve
européen
Les taxis qui s’excitent, les odeurs qui écoeurent, la
poussière qui aveugle, bienvenue à Pristina. Ici s’affiche
un Kosovo moderne, à la pointe de la mode. Les talons aiguilles
qui butent sur les graviers des trottoirs ; les Mercedes aux vitres
teintées qui rôdent, et l’ONU qui travaille …
pas étonnant que l’on puisse y ressentir un léger
malaise. Mais où sommes-nous ? Quelque part entre l’Italie
et l’Amérique, au milieu des bimbos qui peuplent les rues
et des Land Cruisers de l’Unmik Police qui font retentir les sirènes
à tout va.
Au milieu des boutiques et des fast-foods, des dizaines de stands de
laverie automobiles (« auto larje ») fleurissent le Bill
Clinton boulevard. Bichonner sa voiture semble faire partie de la tradition
kosovare. Un homme astique sa superbe Mercedes noire jusqu’à
ce qu’elle luise. Il efface les traces, tout doit briller.
Pristina c’est avant tout sa jeunesse, le rêve européen
exacerbé. Cheveux gominés, Puma aux pieds, Diesel porté
serré, sortir en ville requiert ici d’être impeccable.
Autant de détails qui semblent compter parmi les plaisirs récemment
retrouvés. Désir de rattraper le temps perdu et bien des
frustrations, de vivre au jour le jour, de profiter de chaque instant,
quitte à basculer dans l’insouciance. Pourtant, il transpire
de cette ville un sentiment de fragilité, comme si tout au final
n’était qu’artifice. Comme si cette ville n’était
qu’un château de carte, prête à s’écrouler
à la première bourrasque.
Marion Touboul
Crédit photo : Sylvia Souillet-Désert
Portrait de Bill Clinton le long du boulevard qui porte son nom